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Gravity — 10/10

2013-10-03 — 91mn — United Kingdom, United States of America

Pour sa première expédition à bord d'une navette spatiale, le docteur Ryan Stone, brillante experte en ingénierie médicale, accompagne l'astronaute chevronné Matt Kowalsky qui effectue son dernier vol avant de prendre sa retraite. Mais alors qu'il s'agit apparemment d'une banale sortie dans l'espace, une catastrophe se produit. Lorsque la navette est pulvérisée, Stone et Kowalsky se retrouvent totalement seuls, livrés à eux-mêmes dans l'univers...

Affiche du film "Gravity"

C’est peu dire que ce film était attendu, depuis le choc provoqué par Les Fils de l’homme, l’un des meilleurs films de sa décennie. Drame post-apocalyptique plein d’espoir, ce dernier avait aussi marqué les esprits par la technique de son metteur en scène, notamment en matière de plans-séquences. Gravity est annoncé depuis plusieurs années et a été selon ses dires une vraie épreuve pour Alfonso Cuaròn. Ce long métrage va diviser. Parce que ce n’est pas un film comme on en voit tous les jours et que son pitch paraît léger : en gros, deux membres d’une mission spatiale sont victimes d’un accident et tentent de retourner sur Terre. Cela signifie un seul décor, deux personnages pour tout le film, des dialogues rares et plus généralement très peu de son. Pour couronner le tout, le choix de l’actrice principale peut laisser songeur…

"You can’t beat the view"

Gravity débute par plusieurs plans-séquences d’une dizaine de minutes, dont la beauté est à couper le souffle. Littéralement. On y découvre l’espace, sombre, illuminé par les étoiles et surtout une vue imprenable sur la Terre. La caméra est d’abord fixe, et l’on voit arriver un point lumineux, qui se révèle être une navette autour de laquelle gravitent les astronautes. Une fois le véhicule apparaissant clairement à l’écran, un véritable ballet démarre, Cuaròn continuant à filmer dans une même scène les actions des deux astronautes qui travaillent autour de la station orbitale. L’aspect unique du plan renforce un ultra-réalisme et plonge directement le public au cœur de l’action : plus seulement témoin, on a l’impression d’être tout proche et, lorsque la caméra bouge, de tourner la tête pour suivre ce qui se passe en continu. La 3D renforce l’effet en amenant des objets vers le spectateur, et le simple fait de voir George Clooney dévisser un boulon devient magnifique lorsque l’objet lui échappe et semble s’approcher de l’écran. Cette impression perdure tout au long du film : chaque cadrage est d’une beauté inouïe, des reflets dans les casques jusqu’aux plans larges sur l’espace et la Terre aux multiples couleurs en arrière-plan. Les scènes d’extérieur sont de vraies chorégraphies, rythmées par une B.O. angoissante sans être oppressante. L’action est toujours limpide, un modèle du genre ; elle implique sans cesse le spectateur, et on se surprend plusieurs fois à tenter d’esquiver un débris qui paraît foncer vers soi à toute allure. L’immersion est vraiment le maître-mot du film, et l’environnement est aussi beau qu’hostile : admiratif devant tant de beauté, le spectateur ressent également le danger et vibre à chaque moment délicat. La caméra virevolte, offre un plan élargi puis s’avance jusqu’à l’intérieur du casque pour capter la respiration qui accélère. Seules les conversations radios sont audibles, alors comment ne pas rester bouche bée devant cette explosion magnifique, amplifiée comme jamais par l’absence de son ? Puis, à l’intérieur des navettes, les objets volent et donnent l’impression d’être entouré, et la sensation de vol en apesanteur en caméra subjective offre un rendu incroyable.

Don’t let go

Ces belles images de l’espace ne sont pas vraiment semblables à celles de 2001 : l’odyssée de l’espace, bien que la comparaison ait été maintes fois évoquée. Gravity n’est pas métaphysique, ce n’est « qu’un » survival, et c’est déjà pas mal. Car grâce à la technique évoquée plus haut, le suspense fait son effet et il n’est pas rare que l’on retienne sa respiration pendant de longues secondes, crispé sur son siège. Cuaròn sait montrer que la vie d’un astronaute ne tient bien souvent qu’un à un fil qu’il peut attraper ou non du bout des doigts. La filiation avec le premier cordon, celui qui donne la vie, est d’ailleurs bien cruelle : ici détacher le cordon qui nous retient signifie mourir. Et lorsque le répit arrive enfin, c’est à la manière d’un fœtus que l’astronaute se repose. Il est ainsi question de vie et de mort, de naissance et de deuil dans Gravity ; une jolie métaphore se met peu à peu en place à travers le personnage de Sandra Bullock qui parvient à émouvoir plus d’une fois. Car même les gros plans sur l’actrice, non maquillée, sont superbes et les préjugés sur son talent sont bien vite oubliés. Il y a bien des imperfections çà et là : on pourrait bien reprocher que le plus impressionnant visuellement vient au début du long métrage ; que les quelques touches d’humour ne prennent pas forcément ; ou que la métaphore finale est un peu trop appuyée. Mais on oublie tout dès la dernière scène, en apparence plus simple mais tout autant puissante que les plans initiaux qui utilisent si bien la technologie, tant la symbolique sur la (re)naissance & l’évolution de l’homme est intelligente.

Mes que un film

Après avoir retrouvé ses esprits pendant le générique, on se dit alors qu’Alfonso Cuaròn répond à des questions que tout réalisateur devrait se poser : à quoi sert le cinéma ? ou encore, quelle est l’utilité de la 3D ? Avec Gravity, il fait vivre une fiction au spectateur à travers ses images. C’est trop rare pour ne pas être signalé, Gravity fait réellement ressentir son histoire au public. Dans Avatar, James Cameron avait sans doute créé un environnement 3D plus beau que tous ceux vus avant lui. Cuaròn répond en perfectionnant le procédé : dans l’espace, ses images sont tout aussi bluffantes, mais il y ajoute le réalisme et l’immersion. À l’aide de la technologie, il plonge le spectateur dans sa fiction comme jamais. Gravity, plus qu’un long métrage, est une véritable expérience. La prouesse technique se transforme en une énorme claque, et la relative simplicité de l’histoire en fait une œuvre universelle, et surtout un très, très grand moment de cinéma.

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